Parfois
Je désire défier
L’homme qui a
Tué mon père
Détruit notre maison
Et qui m’a fait fuir
Dans le pays étroit
Des hommes.
S’il me tuait
Je me reposerais
Si je l’achevais
Je serais vengé !
Mais
Si je me rendais compte
Durant le duel
Que mon adversaire
A une mère
Qui l’attend
Ou un père
Qui pose sa main droite
Sur son cœur
Chaque fois que son fils
Tarde à rentrer à la maison
Ne serait-ce qu’un quart d’heure
Alors je ne le tuerais pas
Si j’étais le vainqueur
Je ne le tuerais pas non plus
Si je voyais
Qu’il a des frères et sœurs
Qui l’aiment
Et l’attendent impatiemment
Une épouse
Qui lui réserve un bon accueil
Des enfants
Qui ne supportent pas son absence
Et se réjouissent de ses cadeaux
Des amis, des proches
Des voisins, des connaissances
Des compagnons de cellule
D’hôpital
Ou des amis d’enfance
Qui tiennent à le saluer.
Mais s’il était seul
Branche coupée d’un arbre
Sans père ni mère
Ni frères ni sœurs
Ni épouse ni enfants
Ni amis, ni proches, ni voisins
Ni collègues, ni compagnons, ni confidents,
Je ne rajouterais pas
A la douleur de sa solitude
La souffrance d’une mort
Ou le chagrin d’une extermination
Mais je me contenterais
De l’ignorer
Lorsque je le croiserais dans la rue
Persuadé
Que l’ignorance
Est en soi aussi
Une sorte de vengeance !
Taha Muhammad Ali, Une Migration sans fin
(Poèmes traduits de l’arabe par Antoine Jockey), éd. Galaade, 2012.
Je désire défier
L’homme qui a
Tué mon père
Détruit notre maison
Et qui m’a fait fuir
Dans le pays étroit
Des hommes.
S’il me tuait
Je me reposerais
Si je l’achevais
Je serais vengé !
Mais
Si je me rendais compte
Durant le duel
Que mon adversaire
A une mère
Qui l’attend
Ou un père
Qui pose sa main droite
Sur son cœur
Chaque fois que son fils
Tarde à rentrer à la maison
Ne serait-ce qu’un quart d’heure
Alors je ne le tuerais pas
Si j’étais le vainqueur
Je ne le tuerais pas non plus
Si je voyais
Qu’il a des frères et sœurs
Qui l’aiment
Et l’attendent impatiemment
Une épouse
Qui lui réserve un bon accueil
Des enfants
Qui ne supportent pas son absence
Et se réjouissent de ses cadeaux
Des amis, des proches
Des voisins, des connaissances
Des compagnons de cellule
D’hôpital
Ou des amis d’enfance
Qui tiennent à le saluer.
Mais s’il était seul
Branche coupée d’un arbre
Sans père ni mère
Ni frères ni sœurs
Ni épouse ni enfants
Ni amis, ni proches, ni voisins
Ni collègues, ni compagnons, ni confidents,
Je ne rajouterais pas
A la douleur de sa solitude
La souffrance d’une mort
Ou le chagrin d’une extermination
Mais je me contenterais
De l’ignorer
Lorsque je le croiserais dans la rue
Persuadé
Que l’ignorance
Est en soi aussi
Une sorte de vengeance !
Taha Muhammad Ali, Une Migration sans fin
(Poèmes traduits de l’arabe par Antoine Jockey), éd. Galaade, 2012.