La solitude absolue, le spectacle de la nature, me plongèrent bientôt dans un état presque impossible à  décrire. Sans parents, sans amis, pour ainsi dire, sur la terre, n'ayant point encore aimé, j'étais accablé d'une surabondance de vie. Quelquefois je rougissais subitement, et je sentais couler dans mon cœur comme des ruisseaux d'une lave ardente ; quelquefois je poussais des cris involontaires, et la nuit était également troublée de mes songes et de mes veilles. Il me manquait quelque chose pour remplir l'abîme de mon existence : je descendais dans la vallée, je m'élevais sur la montagne, appelant de toute la force de mes désirs l'idéal objet d'une flamme future ; je l'embrassais dans les vents ; je croyais l'entendre dans les gémissements du fleuve ; tout était ce fantôme imaginaire, et les astres dans les cieux, et le principe même de vie dans l'univers.

Chateaubriand, René, 1802.

_________________________________________________________

Justifications :

Plongèrent : le verbe est au passé simple, car l'action ne se produit qu'une fois.
à : il s'agit de la préposition, qu'on ne peut pas remplacer par avait.
Accablé : il s'agit du participe passé du verbe, puisqu'il est précédé de l'auxiliaire être.
Rougissais : le verbe est à l'imparfait de l'indicatif puisqu'il s'agit d'une action habituelle.
Couler : le verbe est à l'infinitif puisqu'il est précédé d'un autre verbe qui n'est pas un auxiliaire.
Involontaires : l'adjectif s'accorde avec des cris et il est donc au pluriel.
Mes : c'est un déterminant possessif associé au nom songes.
Etait : son sujet, tout, correspond à un singulier.