C'était le jour de l'anniversaire de mon grand-père, celui de ses quatre vingt-dix ans. Il avait eu une belle vie mon grand-père. Il avait appris son métier auprès de son père qui était menuisier, puis il était devenu menuisier à son tour : c'était lui qui avait fait l'armoire se trouvant dans notre séjour. Une armoire d'environ un mètre soixante-quinze de haut, un mètre de large et cinquante centimètre de profondeur; seules les portes étaient sculptées, séparées en deux parties par des reliures horizontales centrées. La partie haute était décorée d'un simple hexagone qui se situait au milieu en relief. La partie basse était gravée de quatre petites fleurs dans les coins et d'une plus grande au centre. Elles étaient en assez mauvais état car j'avais passé mes jeunes années à dessiner dessus. Cette si belle armoire était l'une des dernières œuvres de mon grand-père, à cause d'un accident avec l'une de ses machines. Une lame tranchante comme un rasoir, fixée sur un cylindre métallique mis en rotation par l'action du moteur, lui avait sectionné l'annulaire et l'auriculaire de la main gauche. Depuis ce jour il jouait de l'orgue pour la messe du dimanche à l'église de Mespaul, un petit village breton. Il avait justement aidé à la fabrication des bancs de l'église, des bancs d'environ deux mètres de long, une planche de chêne poncé et verni posée sur deux socles en bois sculptés en forme d'ondes. Il avait eu une belle vie mon grand-père, bien que maintenant le poids des années l'ait rattrapé et marqué de grands cernes sous ses yeux bruns et affublé de cheveux neige. Ses rhumatismes nécessitaient maintenant une aide soignante passant le voir deux fois par semaine, le mercredi et le samedi. Le reste de la semaine c'était ma grand-mère, une ancienne infirmière qui s'occupait de lui. Malgré ses quatre vingt-cinq ans elle avait fière allure, ma grand-mère. Rapetissée par les années, elle restait assez grande, de corpulence moyenne, de magnifique yeux bleus saphir soulignés par des rides, des cheveux blancs coupés court, ayant encore toutes ses dents. J'avais de quoi être fier de mes grands-parents du côté paternel, je les adorais, alors quand on m'apprit la mort de mon grand-père d'une crise cardiaque , j'étais effondré et rien n'avait pu me consoler, et encore aujourd'hui rien ne le peut.
Arwenn, 2019.