En arrivant devant la rue principale, il vit l’écurie, empuantie dans tous ses recoins par des relents d’excréments de chevaux et par la sueur des palefreniers. Un chien errant passa près de lui et sa monture hennit. De l’autre coté de la rue, la prison, faite de briques usées, débordait des lamentations des bandits enfermés. Plus loin, la Droguerie avait comme des allures de bar, où tout les habitués auraient été heureux. Mais en approchant, il se rendit vite compte que la boutique n’avait rien d’un endroit accueillant: le bâtiment était dans un très mauvais état, sûrement après quelques duels au revolver. Il descendit de cheval et entra: il y avait à l’intérieur des rayonnages salis par les rats, et plusieurs boites de conserves étaient entassées dans un coin. Le comptoir était souillé par le sang et la graisse d’un animal, assurément dépecé à l’endroit même pour un client. Au fond, un escalier branlant montait vers le premier étage. En ressortant, il vit un homme qui gisait sur les marches du Saloon, il avait dû être projeté par la fenêtre. Il voulut avancer, mais un mendiant s’accrocha à son bras et lui demanda quelques pièces. Il lui en donna et le quémandeur s’éloigna avec mille remerciements. Au milieu de cette perversion humaine, le bureau du shérif, au bout de cette rue principale, semblait le seul espoir de survie de la ville.
Ce dernier était assis sur sa chaise à bascule, sous le porche, et fumait la pipe. Il ne lui sembla guère de taille à défendre la ville des truands. En passant devant la banque, il vit qu’un braqueur masqué la dévalisait. Il fila bien vite vers le shérif. Il lui demanda ce qu’il comptait faire pour rétablir l’ordre dans cet endroit contaminé jusqu’à la moelle, et son interlocuteur lui répondit qu’au point oû ils en étaient, il ne pouvait plus rien faire pour la sauver.
Thomas, 2019.